Hommage au père Michel Saint Gérand

Le Père Michel Saint Gérand avec Mgr Laurent Percerou et le père Robert Krum,
qui fut curé d’Arfeuilles, village où il est né et ou il sera enterré.

Chers amis,

Michel Saint Gérand nous a quittés hier soir à l’hôpital de Montluçon.

Nous sommes dans l’action de grâce pour tout ce qu’il a donné à l’Eglise diocésaine. Nous le confions à notre Père des cieux et nous demandons pour nous-même d’être habités par cette passion de l’Evangile qui a guidé sa vie.

Bien fraternellement

+ Laurent Percerou
Évêque de Moulins

Le journal de l’Allier – Hommage au père Michel Saint-Gérand

Ses obsèques ont eu lieu le mercredi 17 janvier à 10h au Sacré-Coeur de Moulins

 

Message de Mgr Pascal ROLAND à Mgr Laurent PERCEROU

Cher Laurent,

C’est avec peine que j’ai appris le décès de Michel SAINT GERAND. Ce décès n’a pas été une surprise, puisque tu m’avais alerté sur son état de santé dégradé, lorsque nous avions échangé à Lourdes en novembre dernier. Je regrette fort de ne pas être en mesure de participer aux obsèques mercredi prochain, car j’aurais aimé rendre hommage à celui qui a été un collaborateur proche durant mon épiscopat à Moulins. Mais je serai uni avec le diocèse de Moulins par la pensée et la prière : le matin je célébrerai la messe à l’intention de Michel. Assure bien tout le monde, en particulier le presbyterium et les consacrés, de cette communion à votre deuil.

Je conserve un excellent souvenir de Michel, qui a été un prêtre dévoué à son ministère et un collaborateur fidèle que j’ai fort apprécié. J’ai admiré chez lui le don de sa personne au Seigneur et à l’Église, sa grande simplicité de vie, en fidélité avec son engagement au Prado, son enracinement dans la Parole de Dieu. Lors des conseils, j’ai apprécié le sérieux de sa réflexion, sa liberté de  parole et sa loyauté ; son attention aux personnes, en particulier les petits et les prêtres âgés ; sa qualité d’écoute, son souci constant de la mission, son merveilleux investissement au service de la vie consacrée, pour laquelle il manifestait une grande estime ; sa modestie et sa discrétion.

Je ne doute pas que le Seigneur miséricordieux accueillera celui qui, avec sa grâce, l’a servi de son mieux ici-bas.

 

Homélie des obsèques du père Michel SAINT GERAND

Eglise du Sacré-Cœur, mercredi 17 janvier 2018

 Voilà un infirme de naissance installé à la Belle Porte du Temple de Jérusalem afin de gagner quelques sous pour survivre. Cet homme infirme représente pour nous aujourd’hui, toutes celles et ceux qui portent une infirmité et qui, parfois, se retrouvent ou s’estiment exclus. Je pense à celles et ceux que l’Église peine à rejoindre, ceux que la société abandonne au bord du chemin, ceux qui sont blessés dans leur cœur, dans leur corps et qui « demandent l’aumône », parfois une aumône en argent sonnant et trébuchant, mais qui demandent le plus souvent une aumône de cet argent qui ne fait pas de bruit et qui a le pouvoir, pourtant, de relever, de sauver. Un argent qui a pour nom charité, au sens fort de ce terme, à savoir l’amour de Dieu et du prochain, l’amour du prochain puisé dans cet amour que Dieu a manifesté en Jésus son Fils, venu se faire pauvre parmi les pauvres, jusque dans la souffrance, jusque dans la mort. La charité, celle dont Thérèse de Lisieux a donné une si belle définition : « Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même… »

Pierre et Jean montent au Temple et l’infirme les interpelle. C’est Pierre qui lui répond : « De l’argent et de l’or, je n’en ai pas, mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus-Christ le Nazaréen, lève-toi et marche ! » Pierre, tout comme cet infirme, porte son poids de misère ! Il revient de loin… S’il prétend agir au nom de Jésus le Galiléen, rappelons-nous qu’il l’avait renié par trois fois, au soir de son arrestation alors qu’il avait confessé haut et fort, quelques temps auparavant, qu’il était pour lui le Messie de Dieu ! Sa foi n’avait pas pesé lourd devant la peur d’être à son tour arrêté et exécuté. Mais si Pierre peut agir au nom de celui-là même qu’il avait renié, c’est parce qu’il est un homme réconcilié. Relevé de la mort par l’amour du Père, Jésus l’attendait au bord du lac de Tibériade : « Pierre, m’aimes-tu ? » lui dit-il. « Tu sais bien que je t’aime » répondit Pierre. Alors le pardon était donné, la confiance restaurée. Notre Pierre qui se rend au Temple n’est plus le Pierre tonitruant et sûr de lui, qui exigeait en son temps de Jésus qu’il fasse tomber la colère de Dieu sur les mécréants. C’est un Pierre humble, pauvre, qui se présente devant cet homme parce qu’il a été touché par la miséricorde de Jésus qui lui a fait prendre conscience de ses limites et de ses failles mais, surtout, qui lui a fait réaliser l’amour sans faille de Dieu pour lui, cette confiance infinie qu’il lui fait pour être témoin de son Évangile et agir en son nom. Deux pauvres se font face, à

égalité de pauvreté. Mais l’un sait que le Christ est la seule richesse qui remet debout, quand l’autre ne le sait pas. Comment ne pas lui dire ? Comment ne pas la lui donner, cette richesse, pour que lui aussi puisse se relever et chanter les merveilles de Dieu ? « A l’instant même, ses pieds et ses chevilles s’affermirent. D’un bond il fut debout et il marchait. Entrant avec eux dans le Temple, il marchait, bondissait, et louait Dieu. » Le serviteur, honoré par son maître au retour de son voyage, est celui ou celle qui, tel Pierre, ou tel notre infirme, touché, retourné, par l’amour de Dieu pour lui, n’a de cesse de l’annoncer et d’en témoigner par toute sa vie, à tous les hommes sans exclusive. Michel est un de ces serviteurs, humble, pauvre et missionnaire! Depuis qu’il nous a quittés, le mot qui revient dans tous les témoignages que je reçois est celui de « serviteur ». Serviteur de Dieu dans le ministère de prêtre, donné totalement à l’Église du Christ dans les différents ministères qu’il a occupés et ne comptant pas son temps pour qu’elle demeure fidèle à l’Évangile. Serviteur de ses frères et sœurs qui partageaient sa mission, à commencer par ses frères prêtres et diacres, soucieux de chacun et désireux que se bâtisse entre eux une belle fraternité enracinée en Christ le Bon  Pasteur et le vrai Serviteur. Serviteur de vous autres, frères et sœurs consacrés. Il était convaincu que le don de votre vie exprime la force de l’amour de Dieu, plus fort que les passions terrestres. Serviteur de vous tous, frères et sœurs fidèles laïcs du Christ. Il n’a eu de cesse de vous encourager à prendre toute votre place dans l’Église, pour qu’elle soit l’affaire de tous. Mais il vous encourageait aussi à prendre toute votre place dans le quotidien de la vie des hommes et des femmes de ce temps, au nom de l’Évangile, afin que tel un levain, par vous, il transforme ce monde en une terre de fraternité. Serviteur, enfin, de vous ses amis, nombreux ce matin. Certains d’entre vous ne partageaient pas sa foi au Dieu de Jésus-Christ, mais il a croisé votre route. Il était devenu votre ami et pour vous, la Bonne Nouvelle de l’Évangile avait un visage, celui d’un frère devenu compagnon de vos routes humaines.

Vous perdez un ami mais rappelez-vous toujours que l’Évangile a saveur d’amitié et qu’il ne disparaît pas avec Michel !

Frères et sœurs, nous avons une espérance : « Amen, je vous le dis, c’est lui le Maître, qui la ceinture autour des reins, fait passer Michel à table et passe pour le servir ! » De la table du Maître, il continue à veiller sur chacun de nous, sur son Église diocésaine à laquelle il a tant donné. Dans notre foi en la communion des saints, nous pouvons être certains qu’il continuera à la porter, confiant ses besoins à notre Père des Cieux. C’est dans cette espérance, au souffle de l’Esprit Saint qui anima Michel et lui permit d’être le serviteur qu’il a été, qu’il nous faut avec une force renouvelée, continuer notre chemin ici-bas. Michel nous invite tous, croyants ou non, à être davantage frères et sœurs de tous, travaillant sans relâche à construire une terre plus fraternelle. Et pour nous autres, disciples du Christ, il nous faut retenir de lui cette exigence d’une vie personnelle en conformité à l’Évangile : pauvreté, humilité et contemplation du Christ présent en tout homme, à commencer par le plus blessé. C’est là le cœur de l’enseignement du père Chevrier, fondateur du Prado dont Michel était prêtre. Enfin, pour nous ses frères prêtres qui avons partagé son ministère, retenons de lui qu’au-delà des exigences de la mission, de la fatigue des jours, il ne peut y avoir d’apostolat fécond sans ce temps gratuit offert à notre Seigneur et Maître au cœur duquel nous relisons humblement les traces de son passage dans notre histoire, rendant grâce pour son Esprit à l’œuvre en nos vies et lui demandant humblement le soutien de son esprit pour l’accomplissement de notre ministère qui, pécheurs que nous sommes, nous dépasse de toute part. Le père Chevrier disait du prêtre qu’il devait être « un homme dépouillé », « un homme crucifié », « un homme mangé », Michel a cherché à vivre cet horizon que le père Chevrier a donné aux prêtres du Prado, cet horizon peut-être également le nôtre.

Michel, bon et fidèle serviteur, tu peux entrer maintenant dans la joie de ton Maître. Prends place à sa table et laisse-toi servir par Lui.

+ Laurent PERCEROU
Evêque de Moulins